"A l'apogée de la bêtise humaine et d'une hypocrisie bien mal dissimulée, on nous vend, sans gène aucune, des images d'acceptation et de tolérance derrière lesquelles je ne vois qu'un grand malaise. Nos vies sexuelles sont encore loin d'être défaites de ces siècles d'histoire durant lesquels on a cultivé le rejet des sexualités "déviantes" de l'hétérosexualité dominante, faisant ainsi des homosexuelLEs, bisexuelLEs, transsexuelLEs et transgenres des hérétiques, des marginales / -aux pour qui l’amour n'est pas permis. Leur existence même est prohibée (les degrés d'acceptation sont relatifs à l'époque, bien entendu). Alors on pourra créer toutes les chaînes de télévision et les émissions de radio possibles, faire autant de défilés et de manifestations que l'on voudra, lancer des milliers de modes et écrire encore tant de lois sur les discriminations sexuelles, cela ne suffira pas à panser ce malaise. Bien trop de maux à guérir, bien trop de règles à bannir et d'instincts à étouffer pour que respire pleinement cette liberté sexuelle en laquelle j'aimerais tant croire. Ce ne sont pas ces artifices oiseux qui effaceront dans chacune de nos têtes l'omniprésence de cette homophobie latente qui chaque jour ronge cette tolérance dont tout le monde parle sans que je n'aperçoive, ne serait-ce que l'ombre. Alors cessez de vous retourner la bouche pleine de "souilles l'amour", les oreilles gorgées de messes basses et les yeux pleurant de frustration face à ces humains qui vivent au grand jour cet amour depuis si longtemps ombragé. Le seul progrès possible passe par notre comportement quotidien et non par une pseudo prise de conscience annuelle, estampillée d'un arc-en-ciel et de musique techno pour officialiser notre engagement et crédibiliser notre bonne conscience. Tout ça, c'est du folklore comparé aux réactions stériles et primitives que l'on peut observer durant tout le reste de l'année.
Les mœurs changent, mais pas seules."
- Morgan
"Difficile de s’imaginer à quel point l’homophobie est présente dans nos vies. Nos rapports – qu’ils soient avec une fille ou un garçon – en sont imprégnés. Et bien souvent, plus difficiles à déceler qu’on peut le croire.
Comment, par exemple, être accepté en tant qu’« homme » si l’on ne met pas en avant notre virilité ? Ou comment être perçue comme « femme » si l’on n’est pas immédiatement séduisante et disponible ?
Bien sûr, ce ne sont que deux exemples parmi des centaines, des milliers... Pourtant, ils nous enferment de plus en plus chaque jour dans notre rôle d’homme ou de femme.
Ce ne serait pas un problème si tout le monde s’accommodait de cette vision bipolaire des sexes. Mais il suffit d’être un minimum observateur / -trice pour se rendre compte que personne n’est fondamentalement « homme » ou « femme ».
L’être humain est bien plus complexe que cela. Tout le monde peut ressentir des envies que l’on attribue à un genre ou à un autre. Mais trop souvent, il faut les cacher, enfouir ses désirs au plus profond de soi-même de peur d’être rejeté, de se retrouver seulE, isoléE, d’être considéréE comme marginalE... Et de cette peur naît la souffrance. Que l’on tente de nier ses désirs ou au contraire de les assumer et de les vivre au grand jour, cette souffrance restera la même... A cause de ces regards méprisants. A cause de ce cloisonnement de la pensée.
Déconstruire les rôles qui nous ont été attribués n’est pas chose facile, je suis bien d’accord. Mais pourtant nous serions tellement plus heureuses / -x et épanouiES si nous pouvions
vivre librement et dans le respect d’autrui nos désirs, nos amours, notre sexualité."
- Hervé
"Les politiques assimilationnistes promues par une partie relativement importante des homoEs mainstream en France vont dans le sens d’une égalité en droits. Les diversités des sexualités et la multiplicité des parcours sont niées pour mieux laisser la place à une tolérance institutionnalisée, où chacunE d’entre nous est un citoyen comme les autres, sans histoires ni spécificités. Les critiques de l’hétérosexualité comme système politique et les questionnements sur le patriarcat ne peuvent pas trouver d’échos dans ce cadre, allant à l’encontre du modèle capitaliste.
Le droit à la représentation a eu un écho dans les médias. Si la place consacrée dans les programmes télévisuels aux homosexuelLEs est plus importante, elle reste focalisée sur les gays blancs, friqués et virils – invisibilisant les autres ‘minorités’ et empêchant une remise en question de fond sur les genres. Les représentations médiatiques de la communauté gay sont assez explicites sur sa modélisation en cible marketing à part entière.
Tant que nous n’aurons pas procédé à la critique de cette société et que nous ne percevrons pas les genres, le sexe ou l’amour – ainsi que les classes et les races - comme des productions culturelles à part entière, la justice sociale et l’équité resteront des buts."
- Gaël